Le début du poème est disponible ici : § 1-2.
LE VOYAGE ET LE RETOUR (§ 3)
Ô ton corps ! ton parfum me voilait les yeux : je ne voyais pas ton corps (un parfum doux et aigu) : là dans le grand miroir nu, dans le grand miroir nu voilé des fumées de violette, en haut baisé par une étoile de lumière était le beau, le beau et doux don d’un dieu : et les timides mamelles étaient gonflées de lumière, et les étoiles étaient absentes, et pas un Dieu n’était dans le soir d’amour de violette : mais toi légère toi sur mes genoux tu t’asseyais, cariatide nocturne d’un ciel enchanteur. Ton corps un don aérien sur mes genoux, et les étoiles absentes, et pas un Dieu dans le soir d’amour de violette : mais toi dans le soir d’amour de violette : mais toi baissés tes yeux de violette, toi qui à un ciel nocturne inconnu avais ravi une mélodie de caresses. Je me rappelle, chérie : légers comme les ailes d’une colombe toi tes membres tu posas sur mes nobles membres. Ils s’essoufflèrent heureux, respirèrent leur beauté, s’essoufflèrent à une plus claire lumière mes membres dans ta docile nuée aux reflets divins. Ô ne les embrase pas ! ne les embrase pas ! Ne les embrase pas : tout est vain vain est le rêve : tout est vain tout est rêve : Amour printemps du rêve tu es seule tu es seule qui apparais dans le voile des fumées de violette. Comme une nuée blanche, comme une nuée blanche près de mon cœur, ô reste ô reste ô reste ! Ne t’attriste pas ô Soleil !
Nous ouvrîmes la fenêtre au ciel nocturne. Les hommes comme des spectres vagabonds : ils vagabondaient comme les spectres : et la cité (les rues les églises les places) se composait en un rêve cadencé, comme par une mélodie invisible surgie de ce vagabondage. N’était-il donc pas le monde habité de doux spectres et dans la nuit n’était-il pas le rêve réveillé en toutes les puissances siennes triomphal ? Quel pont, demandâmes-nous muets, quel pont avons-nous jeté sur l’infini, que tout nous apparaît ombre d’éternité ? À quel rêve élevâmes-nous la nostalgie de notre beauté ? La lune surgissait dans ses vieux volants derrière l’église byzantine.
Dino Campana, extrait des Canti Orfici, traduit par Irène Gayraud.
IL VIAGGIO E IL RITORNO (§ 3)
O il tuo corpo! il tuo profumo mi velava gli occhi: io non vedevo il tuo corpo (un dolce e acuto profumo): là nel grande specchio ignudo, nel grande specchio ignudo velato dai fumi di viola, in alto baciato di una stella di luce era il bello, il bello e dolce dono di un dio: e le timide mammelle erano gonfie di luce, e le stelle erano assenti, e non un Dio era nella sera d’amore di viola: ma tu leggera tu sulle mie ginocchia sedevi, cariatide notturna di un incantevole cielo. Il tuo corpo un aereo dono sulle mie ginocchia, e le stelle assenti, e non un Dio nella sera d’amore di viola: ma tu nella sera d’amore di viola: ma tu chinati gli occhi di viola, tu ad un ignoto cielo notturno che avevi rapito una melodia di carezze. Ricordo cara: lievi come l’ali di una colomba tu le tue membra posasti sulle mie nobili membra. Alitarono felici, respirarono la loro bellezza, alitarono a una più chiara luce le mie membra nella tua docile nuvola dai divini riflessi. O non accenderle! non accenderle! Non accenderle: tutto è vano vano è il sogno: tutto è vano tutto è sogno: Amore, primavera del sogno sei sola sei sola che appari nel velo dei fumi di viola. Come una nuvola bianca, come una nuvola bianca presso al mio cuore, o resta o resta o resta! Non attristarti o Sole!
Aprimmo la finestra al cielo notturno. Gli uomini come spettri vaganti: vagavano come gli spettri: e la città (le vie le chiese le piazze) si componeva in un sogno cadenzato, come per una melodia invisibile scaturita da quel vagare. Non era dunque il mondo abitato da dolci spettri e nella notte non era il sogno ridesto nelle potenze sue tutte trionfale? Qual ponte, muti chiedemmo, qual ponte abbiamo noi gettato sull’infinito, che tutto ci appare ombra di eternità? A quale sogno levammo la nostalgia della nostra bellezza? La luna sorgeva nella sua vecchia vestaglia dietro la chiesa bizantina.